Archives par mot-clé : éthique

Biodiversité, l’avenir du vivant

Notre biodiversité va mal. Je ne vous apprends rien. Mais voici un livre qui porte un regard moins pessimiste sur ce bouleversement, et nous propose de réfléchir sur les relations entre l’homme et la nature.

Homo transformator

Il n’est pas évident […] que l’homme ait la sagesse qui siérait à un animal savant ; en revanche, né du changement, il est devenu une espèce envahissante contribuant à son tour au changement de la planète, à une vitesse sans précédent, créant ainsi une situation radicalement nouvelle.” (p. 99)

Patrick Blandin est un spécialiste d’entomologie et d’écologie, entre autres, avec une grande expérience de recherche sur le terrain : le milieu naturel, c’est son truc ! Il aurait donc beaucoup de raisons de nous écrire une complainte sur la destruction de la biodiversité.

Mais en fait, non. Notre naturaliste ne va pas régler ses comptes avec le genre humain, même si la première moitié de son livre dresse un bilan peu réjouissant.

Et alors que certains aimeraient renommer l’Homo sapiens en Homo destructor, l’auteur préfère Homo transformator. Voilà qui résume bien son point de vue…

ExtraPaul plongé dans la biodiversité
ExtraPaul plongé dans la biodiversité

L’impossible inventaire

[…] plus de 800 espèces animales et végétales ont été officiellement déclarées disparues du fait des hommes, depuis l’an 1500. Une hécatombe ?” (p. 113)

Ce chiffre parait scandaleux. Parcourir la liste rouge de l’UICN serre le cœur. C’est révoltant de savoir que Martha, dernière représentante des quelques milliards de tourtes voyageuses, s’est éteinte en 1914 dans son zoo de Cincinnati…

Sans excuser ces catastrophes, il est toutefois permis de relativiser : quelques 1.800.000 d’espèces sont recensées, et ce chiffre est déjà énorme. Mais il est certainement sous-estimé : si on en découvre environ 16.000 par an, il faudra encore des dizaines d’années, voire des siècles, pour que les nombreux spécialistes complètent un inventaire que l’on estime entre quelques millions… et 80 millions d’espèces !

Pourquoi tant d’approximations dans ces chiffres ? Voici quelques raisons.

  • La notion d’espèce n’est pas évidente : derrière une même morphologie peuvent se cacher plusieurs espèces biologiquement séparées. Heureusement que depuis peu le barcoding nous aide.
  • Le recensement a commencé dans les lieux les plus connus et accessibles par l’homme. Il reste tout un monde inconnu à découvrir.
  • Certaines catégories, comme les oiseaux, suscitent plus d’intérêt, et donc plus d’observations, que d’autres, comme les insectes. Or ceux-ci sont autrement plus nombreux.

Premier bouleversement

Bien des fois, en quelques millions d’années, la biosphère a traversé des phases de réorganisation, ce que l’on se plaît aujourd’hui à appeler les crises de la biodiversité. Mais jamais le monde vivant n’avait été attaqué globalement par l’un de ses membres. C’est pourquoi je trouve ridicule de désigner la période actuelle comme la sixième crise de la biodiversité.” (p. 143)

Et tournons la page pour découvrir en majuscules le nom donné par l’auteur à cette crise : PREMIER BOULEVERSEMENT.

Car les crises précédentes ont mis plusieurs siècles à faire disparaître certaines espèces. Des paléontologues ont établi que la vitesse d’extinction “naturelle” est de l’ordre de 0,7 à 1,5 espèce par siècle. Or, nous en serions à une vitesse d’extinction 250 à 550 fois plus élevée. “Une honte pour la civilisation” (p. 121)

Peut-être est-ce encore pire qu’on ne le croit : les scientifiques n’ont analysé que les espèces connues. Soit à peine 2 % de toutes les espèces que notre planète pourrait abriter. L’ampleur de la catastrophe serait sous-estimée.

On se consolera juste en sachant qu’il n’est pas évident d’annoncer qu’une espèce est définitivement éradiquée : “L’apparence de l’absence n’est pas la preuve de l’extinction.” (p. 118)

Cinq crises ont déjà bien entamé notre biodiversité
Notre biodiversité a déjà trébuché 5 fois :
la 6ème sera-t-elle fatale ?

Homo conservator

Depuis la fin du XIXème siècle l’homme constate la dégradation du milieu naturel et s’en préoccupe. Mais les idées sur la manière de résoudre ce problème ont évolué. Protéger des espaces contre l’influence de l’homme ne parait plus la meilleure solution, car…

  • Nous avons tendance à inventorier la biodiversité sur la base d’un territoire. Mais c’est oublier une autre variable de l’équation : le temps. Car la biodiversité évolue constamment. Dès lors, quel est le sens à vouloir protéger, et donc figer, un territoire ? Est-il plus “naturel” qu’hier, qu’il y a cent ans ou mille ans ?
  • La plupart de nos forêts n’ont plus rien de “primitif” : on leur doit même une certaine beauté par la main de l’homme. Alors, doit-on protéger contre l’intervention humaine, et laisser faire la nature, quitte à avoir des espaces assez éloignés d’une beauté sauvage imaginée dans l’inconscient collectif ?
  • Comment juger de la richesse d’une biodiversité ? Sur la base d’une certaine valeur utilitaire ? (ce qui conduit au développement durable), de la rareté de certaines espèces ? (mais une espèce peut être rare dans certains pays et commune dans d’autres), d’un potentiel commercial ? (et donc appliquer les lois du marché sur la biodiversité ?).
  • Qui dit protection, dit espèce indigène à éradiquer. Mais comment juger qu’une espèce est un envahisseur ? L’arbre à papillons, si répandu, est-il à classer dans les aliens ? Faut-il massacrer l’Ibis sacré qui s’est acclimaté dans l’Ouest de la France ?

Le passé est assurément de bon conseil, mais il ne faut pas s’interdire d’envisager l’installation d’espèces venues d’ailleurs, qui peuvent renforcer le potentiel local d’adaptation.” (p. 251)

Homo ethicus

Voyant émerger de plus en plus d’Homo conservator, l’auteur plaide pour un contrôle démocratique de la richesse de notre biosphère, ce qui ne se traduit pas par une protection de la nature contre la main de l’homme, bien au contraire. Il faut se faire à l’idée que nos espaces “sauvages” (wilderness est le bon terme) n’existent quasiment plus depuis l’apparition de l’Homo Transformator. Et ce dernier fait partie intégrante de la biosphère.

L’auteur plaide donc pour une éthique pour la biosphère. Une prise de conscience qui verra apparaître l’Homo ethicus : “La biodiversité devient partie des projets de société : elle doit être voulue. Puisque le concept de base est l’évolution, et non plus l’équilibre permanent, l’objectif, pour une société locale, c’est de piloter systèmes écologiques et biodiversité en fonction du projet de vie qu’elle a construit… lequel peut être, pourquoi pas, de tenter de maintenir, contre vents et marées, un état voulu à tout prix.” (p. 244)

La main-mise invisible

On sent que Patrick Blandin connait sa matière, acquise sur le terrain. Après cette lecture, on relativise… un peu.

Car tout le monde ne sera pas d’accord avec cette vision très humaniste, qui fait peu de cas d’un monde de plus en plus dirigé par l’économie de marché : l’Homo ethicus n’est pas prêt de diriger le monde, et le livre d’Attac est bien plus critique à propos de la main-mise sur la biodiversité.

A moins que, comme l’auteur se risque à dire, la “sélection naturelle” ne joue aussi sur l’homme, favorisant les communautés humaines qui auront renforcé les capacités d’évolution de la vie locale comme celles de la biosphère toute entière…

Nous voici "pilotant" la nature... (p. 197)

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Allez vous rhabiller… responsable !

Non, s’habiller éthique et responsable ne veut pas dire ressembler à un hippie ou un soixante-huitard en tricot ! Suivez-moi : pour une fois je vais vous inciter à consommer…

De belles éthiquettes

L’année 2013 a été révélateur du peu d’éthique présent derrière la plupart de nos vêtements (et ce n’est pas faute de vous avoir prévenu). Deux exemples : la catastrophe de Dacca, et Abercrombie & Fitch qui pousse le marketing à son paroxysme.

Voilà qui me donne peu de plaisir à renouveler ma garde-robe – déjà que je ne suis plus adepte du shopping !

Heureusement, certains créateurs sont soucieux d’éthique, et me donne une belle occasion de me rhabiller.

Sweat Greenwish, t-shirt Armedangels
Sweat Greenwish, t-shirt Armedangels

Mais qu’est-ce qu’un vêtement éthique ? Pour la plupart des marques que je porte ici, les points suivants sont respectés :

  • matière première issue de l’agriculture biologique ;
  • produits les moins polluants possible, en particulier des teintures naturelles ;
  • matières issues du recyclage ;
  • conditions descentes et paiement correct des travailleurs.

Allez hop, j’enfile mes habits et me fais modèle, photographié par Gérard Lambot.

Greenwish, vert et belge

Greenwish est belge, et le “vert” est son cheval de bataille : leur charte est impressionnante !

Ils font des tee-shirts, des polos, et des sweat-shirts, comme celui que je porte tout le temps : regardez bien la prochaine fois que vous me voyez…

T-shirt Armedangels
T-shirt Armedangels

On ne peut les acheter que sur internet, mais parfois la marque est présente sur certains ‘événements. Hélas l’agenda sur leur site n’est pas à jour : suivez-les plutôt sur Facebook.

Armedangels, pensée organique

Armedangels est une marque allemande, bio et fairtrade. C’est par hasard que je suis tombé sur elle, chez Today is a good day : un magasin de mode qui prend les éco-chèques.

Allez donc visiter le site de Armedangels : leur choix de vêtements est énorme, allant du t-shirt au jeans.

Nudie, la vérité nue sur les jeans

Voilà une marque qui soigne son image, et quand vous êtes dans leur jeans, reconnaissable au grand “N” sur l’étiquette arrière, vous êtes fier de porter du “sustainable”.

Jeans Nudies, chaussures Não
Jeans Nudies, chaussures Não

Il faut dire que le fascicule (en papier recyclé, évidemment) attaché dans la poche arrière droite vous met en condition : la marque suédoise vous explique le processus de fabrication, tout en vantant les mérites de porter un jeans usé et… réparé ! C’est simple : en Suède, certains magasins font la réparation gratuite…

Cette marque est distribuée dans quelques magasins en Flandre.

Não, travail respectable

Quand vous entrez dans un magasin de Não do Brazil, vous tombez sur un festival de couleurs : les chaussures s’alignent (une étagère par pointure), tous de même modèle, mais d’habillage différent. Chaque paire est unique !

Créé par un français et un brésilien, la marque tient le discours suivant : “La loi Brésilienne interdit le travail des enfants. Les chaussures NÃO sont fabriquées artisanalement, sous notre contrôle, par des adultes dans nos ateliers et cousues à la main dans certains quartiers défavorisés de la région du Minas Geraïs au Brésil.

On trouve plusieurs magasins en France, par exemple à Lille, et je vous recommande de vous y rendre plutôt que de commander en ligne : les pointures sont approximatives. Ben oui, je vous disais que c’est artisanal !

Lonesome George & Co, agent du changement

ExtraPaul habillé en Lonesome Georges & Co
T-shirt Lonesome Georges & Co

Avec cette marque équatorienne (ou américaine ? je n’arrive pas à savoir), on est carrément dans l’action sociale. Son cheval de bataille la défense de la nature (Lonesome Georges est le nom d’une tortue des Galápagos, dernière représentante de son espèce et éteinte en 2012). Elle désigne ses clients comme des “agents du changement”.

En plus de vendre des vêtements en coton bio et d’avoir une ligne de fabrication éthique, la marque investit une partie de ses bénéfices dans l’éducation et la prise de conscience des problèmes environnementaux : c’est même une mission majeure sur leur site.

Jeans Kuyichi
Jeans Kuyichi

Il y a quatre magasins… aux Galápagos et en Équateur… C’est loin ! Mais vous pouvez commander par Internet.

Kuyichi, socialement responsable

Kuyichi est… hollandais (vous l’aviez deviné ?). À en croire leur site, ils seraient précurseur dans le “fashion” responsable. Leurs engagements sont nombreux, parmi lesquels le polyester récupéré des bouteilles en plastique, un code de conduite pour les travailleurs, le colorant naturel…

La marque est distribuée dans quelques magasins d’Europe, on peut commander sur Internet, et parfois on la trouve sur des sites de vente “outlet”.

Victime enthousiaste

Voilà, je conclus mon défilé, sans avoir montré mes dessous

Je ne vais pas vous le cacher : ces vêtements coûtent un peu plus que la normale, en particulier les jeans. Mais si on veut être acteur du changement, il faut y mettre de sa poche, et cela tant que l’économie durable n’est pas la norme.

T-shirt Lonesome George & Co et ceinture en pneu !
T-shirt Lonesome George & Co et ceinture en pneu !

On peut aussi mettre en doute le discours de ces marques, et se demander si je ne suis pas leur victime enthousiaste, aveuglé par du greenwashing ? Eh bien, je fais confiance à ces jeunes sociétés, fondées autour de principes durables, et me méfie des grandes marques qui essaient de se refaire une image.

En tout cas, j’ai un grand plaisir à porter ces griffes, ainsi que de participer à une économie respectant mes valeurs.

Et vous, avez-vous des marques à me faire découvrir ? Dites-le dans les commentaires…

S'habiller responsable...

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Les Créatifs Culturels en Belgique

Voilà, j’ai refait le site des Créatifs Culturels en Belgique. Voici comment ça s’est passé…

Plus de Comic pour les CC

Rappelez-vous, il y a deux mois, je vous parlais d’un mouvement mondial qui s’ignorait : les Créatifs Culturels. Soit des gens cherchant d’autres valeurs, une autre manière de vivre. A l’époque, je m’étais interrogé sur le mouvement en Belgique : existe-t-il ? Sont-ils représentés ? Font-ils quelque chose ? La réponse fut vite trouvée, par l’existence du site www.creatifsculuturels.be. Un groupe semblait bien actif, avec même à son actif une grande enquête en 2012, portant sur l’évolution des valeurs et des comportements.

Par contre, il était manifeste que les “Créateurs d’une nouvelle culture” n’avaient pas trouvé de créateurs de site ! D’une écriture bleue foncée en Comic MS (ce set de caractères est aux designers ce que l’ail est aux vampires : il les fait fuir !) sur un fond bleu ciel, je ne pouvais laisser les choses en l’état. C’était presque une perche tendue, une porte grande ouverte pour contacter les Créatifs Culturels de Belgique – et plus si affinité…

Site web et démocratie

J’envoie un message à l’adresse officielle et la réponse vient un jour plus tard : c’est de bonne augure. C’est un certain Vincent qui me répond : il est l’initiateur du mouvement en Belgique, et par défaut le concepteur du site, qu’il a dû improviser sur trois jours en 2009.

J’apprends vite que si le site est resté en l’état, c’est parce que le groupe de travail qui devait le repenser n’est pas arrivé à mettre tout le monde d’accord…

C’est que le groupe fonctionne comme bien des mouvements de société : les décisions sont collégiales. Mais, ici je m’exprime en tant que professionnel, la démocratie n’est pas toujours bonne pour faire un site web efficace…

Tout en rondeur

Vincent accepte ma proposition de travailler sur le site : le gros du travail sera l’image et non le contenu, qui existe déjà et pourra être repris quasiment tel-quel.

Vincent et ExtraPaul sont créatifs
ExtraPaul et Vincent sont créatifs

Mais quelle image ? Voici les consignes : le site doit s’accommoder du logo en orange et turquoise, éviter les  angles pour privilégier les rondeurs (ce qui est assez éloigné des tendances actuelles), afin d’être féminin plutôt que masculin. Et ne pas verser dans les clichés New Age, ni écolo, ni mystique, ni futuriste… Ah oui, et un menu avec une écriture manuscrite (handwriting).

Tout cela parait contraignant, mais les Créatifs Culturels sont peu connus : dès lors il ne faut pas que le mouvement soit mal interprété.

Des bambous belges

Sur la durée des grandes vacances, Vincent et moi échangeons nos idées, pour produire 19 projets déclinés en 53 variantes ! Cela fait beaucoup, et pour cause : si je n’ai affaire qu’à lui, de son côté il soumet les projets à quelques CC. La démocratie continue donc : les avis fusent, divergent, et certains designs souffrent déjà du compromis…

Un concept émerge cependant, venant de Vincent : les bambous ! C’est une drôle d’idée de choisir une plante exotique pour un site pour la branche belge, mais voici :

Ce bambou chinois est une magnifique métaphore des Créatifs Culturels : le phénomène CC n’est pas émergent, presque personne ne le connaît encore, mais les racines sont en train de pousser, nombreuses, différentes, silencieuses…” (voir Pourquoi des bambous ? sur le site)

Après deux mois de brainstorming, les choses se précipitent, car la rentrée arrive : c’est que le nouveau site doit être prêt pour l’annonce d’une conférence le 26 septembre. Je convaincs Vincent d’abandonner certaines directives de départs et quant à lui, il tranche : ce sera la forêt de bambous et pas le blé qui pousse vers un ciel bleu.

En moins d’une semaine, le site est refait, la page Facebook est créée, ainsi que le modèle de newsletter…

Des sites comme dans les caravanes

Le bambou de cette nouvelle culture, lorsque son temps sera venu, deviendra visible pour tous. Mais pour qu’il développe son plein potentiel d’évolution de notre société, il faudra que ses différentes racines se reconnaissent enfin entre elles, qu’elles se sachent nombreuses et se comprennent complémentaires.

Eh bien j’espère avoir contribué à cette reconnaissance. Et qui sait si je n’en suis pas un aussi ?…

Les projets ont défilé
Les projets ont défilé

Et vous, êtes-vous un Créatif Culturel ? Répondez à ce questionnaire puis donnez le résultat dans le sondage ci-dessous…

Etes-vous un Créatif Culturel ? (pour vous aider, faites le test dont le lien est donné plus haut)

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