Archives mensuelles : juillet 2013

Et si j’étais riche ?

Nous randonnons sur un sentier du littoral de la Côte d’Azur quand un hélicoptère nous survole d’assez près pour nous décoiffer : et pour cause, il atterrit dans la propriété d’une des belles villas qui bordent ce magnifique et riche littoral.

Mais l’incrédulité est de mise quand nous voyons sortir de l’appareil un couple avec leurs valises. Que l’on puisse utiliser un hélicoptère pour arriver sur son lieu de villégiature nous parait aussi choquant que la campagne publicitaire pour le parfum “Le Beau Mâle” (mais si, celui avec la peau de l’ours blanc !). Sauf que celle-ci cherche peut-être la provocation, et pas ce couple-là.

Un  hélicoptère pour arriver à sa villa
Comme on dit : “Ça le fait !”

Comme dirait l’autre : “Nous n’avons pas les mêmes valeurs”. Et il est manifeste que nous sommes en bas de l’échelle (euh non, plutôt en bas de l’escalier aboutissant à une porte blindée avec caméra), ne partageant avec ces riches vacanciers qu’un décoiffage dû à un vent d’Ecureuil…

L’Ecureuil a soif

Existe-t-il un engin consommant plus qu’un hélicoptère, au kilomètre ? Un char d’assaut ? La fusée Ariane ? Bon, je ne cherche pas vraiment car voici un chiffre : 165 litres… par heure. Voilà la consommation de l’Ecureuil AS 350, probablement le modèle qui nous survole – la flotte de l’autre côté de la baie en dispose…

Que ce soient quelques minutes pour traverser le Golfe de Saint-Tropez, ou les 15 minutes pour venir de Cannes, voilà un taxi qui aura consommé entre une douzaine et une quarantaine de litres… Fois deux ! Car ne croyez pas que l’engin revienne à sa base avec d’autres passagers, ni même avec les vidanges consignées, ou avec les sacs verts des déchets de jardin ! Non non : “Au revoir madame, au revoir monsieur, voici ma carte : n’hésitez pas à m’appeler si vous voulez faire des courses en ville…

Je disais plus haut que nous sommes sur un riche littoral. Oui, “riche” à prendre dans tous les sens du terme…

Allez, rien qu’une fois

Bon, stop !

Si j’étais riche, aurais-je de telles réflexions ? Ferais-je l’impasse sur un transport aussi fun que l’hélicoptère, qui me coûterait ce qu’à d’autres coûte le bus ?

Et si j’étais riche, aurais-je seulement conscience de tous les problèmes qui font l’objet de ce blog ? Et quand bien même, aurais-je la volonté de réduire mon train de vie et de ne pas profiter de ce qu’un millionnaire peut s’offrir ? Ne consommerais-je pas sans compter, soulageant ma conscience à coups de donations et compensations carbone ?

Et à défaut d’être riche, si ma modeste personne écolo bobo de la classe moyenne était l’invité d’un riche ami, m’offrant le trajet en hélicoptère, le refuserais-je ? Ah, voilà un cruel dilemme. Et la plupart d’entre vous dirait : “Tu serais bien con de refuser !” . “Pour un fois” . “Ce n’est pas ça qui sauvera la terre” .

Ce serait dommage de ne pas en profiter
Promotion ! Ce serait dommage de ne pas en profiter !

Si je me regardais dans le miroir

Mais où voulais-je en venir ? Avec des “si”, on… ferait voler un hélicoptère à l’énergie photo-voltaïque !

Eh bien voici la leçon que je tire de cette décoiffante expérience : nos réflexions et jugements sont souvent dictés par notre propre situation, le contexte de notre vie. La critique est facile envers les gens qui ne partagent pas notre contexte social, quand ce n’est pas de l’incompréhension quand il s’agit d’autres cultures.

Je ne dis pas qu’il ne faut rien critiquer et excuser tout le monde. Mais s’imaginer dans la peau de l’autre est un exercice intellectuel qui permet de prendre plus de… hauteur, et de “se regarder dans le miroir”.

Épilogue

Y a-t-il un transport plus énergivore que l’hélicoptère ? J’ai trouvé le Crawler-transporter, avec 600 litres à l’heure.

Et le jour où un très riche l’utilisera pour faire une DJ Party en mouvement de sa villa à la plage, il recevra mes foudres.

Il ne faudrait pas exagérer, quand-même !

Arriver sur son lieu de villégiature en hélicoptère...

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L’humanité disparaîtra, bon débarras !

Ce n’est pas moi qui le dis, c’est le titre d’un livre, prix du pamphlet 2006. Mais quand-même !

Un philosophe provocateur

Yves Paccalet n’est pas tendre avec l’Homme. Sans doute que ses années avec le commandant Cousteau lui ont appris à aimer les animaux plutôt que la race humaine, et il ne se cache pas pour le dire.

Et il dit même bien ! Car n’allez pas croire que Paccalet est un naturaliste qui s’est trouvé un don d’écrivain : notre homme est philosophe avant tout, auteur de quelque 70 ouvrages. Il a l’écriture facile, et un livre comme celui-ci est une mine d’expressions et de phrases bien tournées. Ce n’est pas pour rien que l’ouvrage a été adapté au théâtre, en 2008.

Après un cataclysme nucléaire, il ne restera plus grand chose à lire ((c) The Road by John Hillcoat)
Après un cataclysme nucléaire, il ne restera plus grand chose à lire (© The Road by John Hillcoat)

Déçu de l’humanité

J’ai cru en l’homme. Je n’y crois plus. J’ai eu fois dans l’humanité : c’est fini.

Ainsi commence le livre : le ton est donné pour les quelque 180 pages qui suivront. Autant le dire tout de suite : avec ce genre de lecture, on n’apprend rien, ou si peu. Des faits et des chiffres sont jetés à la tête, sans référence, sans les sources : on ira vérifier tout ça ailleurs ! Mais ne nous encombrons pas de ces détails : le but est bien de se défouler, et on prend plaisir à lire cette grosse tarte à la crème lancée à la face de cette humanité qui se prend pour le maître du monde, ainsi que de toutes les espèces vivantes.

Qu’est-ce que l’homme ? Platon avait dit “Un animal à deux pieds sans plumes” . L’auteur ajoute : “un ravageur imprévoyant ; un destructeur invétéré ; un saccageur qui n’a d’autres préoccupation que son intérêt immédiat ; une espèce violente envers les autres comme envers lui-même ; un danger pour tout ce qui respire.” (page 17)

Nous sommes des parasites

Du point de vue de l’écologie, j’ai conscience d’avoir commis une lamentable erreur. Les engendrer fut un non-sens – la pire imbécilité de mon existence, qui n’en a pas manqué.” (p. 51)

C’est ainsi que l’auteur parle de ses quatre enfants, qu’il a eu la faiblesse d’ajouter à la “vague humaine”. Car question démographie, il n’est pas tendre : l’homme ne participe pas à l’équilibre de la vie sur terre. Il se conduit comme un parasite : “Nous ne sommes ni le fleuron, ni l’orgueil, ni l’âme pensante de la planète : nous en incarnons la tumeur maligne.” (p. 55)

C’est donc le grand clash avec les religions, dont l’implication n’est pas des moindre dans tout ce grand pullulement sans entrave. Trois bébés chaque seconde : dans quel but ? Quel en est le sens ? “Notre peuple de bipèdes à poils rares s’accroit chaque année de plus de soixante millions de sujets. Une France ou une Grande-Bretagne supplémentaire tous les 12 mois. Disons, plus justement, un demi-Bangladesh ou six Niger : car la grande majorité de ces nouveaux-nés passent directement des entrailles de leur mère dans les bras de la misère.” (p. 56)

Treize bonnes raisons de mourir

L’humanité a toutes les chances de disparaître, que ce soit de sa faute, ou par une grande claque donnée par mère nature. Voici les 13 scenarii imaginés par l’auteur. La distinction entre certains n’est pas évidente, mais ne boudons pas notre plaisir…

  1. Une grosse météorite de 10 kilomètres de diamètre nous tombera dessus. Toute notre technologie, et en particulier nos missiles nucléaires, ne pourront rien y faire : ce sera le même cataclysme que celui qu’ont connu les dinosaures.
  2. La terre traversera un nuage de poussière interstellaire : une glaciation commencera, sur des dizaines d’années, et les hommes s’entretueront pour les ressources.
  3. Quelques volcans entreront en furie : voir le point 2 pour le dénouement…
  4. Nous serons surpeuplés : “Aujourd’hui, la Terre entière est l’île de Pâques, et l’humanité un village polynésien en sursis” . (p. 150)
  5. Nous serons anéantis par les armes de destruction massive. Nucléaire, biologique ou chimique ? Montez sur un toit pour être tué dans la première minute, car les survivants ne vont pas rigoler…
  6. La biosphère sera détruite. “Durant les 5000 ans qui viennent de s’écouler, notre espèce a déplacé un tel volume de terre et de pierres qu’on aurait pu s’en servir pour construire une montagne de cent kilomètres de longueur, quarante de largeur et quatre de hauteur. Le volume des Alpes françaises !” (p. 153)
  7. Les mers disparaitront. Car si l’Homme peut tuer la mer d’Aral, il peut toutes les tuer…
  8. Nous terminerons comme les dauphins, qui ne vont pas bien : comme eux nous sommes en haut de la chaîne alimentaire, et c’est ainsi que nous mangeons toute notre pollution. Retour à l’expéditeur !
  9. La biodiversité s’effondrera. “Faut-il, pour un peu plus de croissance ou de puissance, exterminer les derniers loups, jaguars, aigles, cachalots ou requins blancs ?” (p. 162)
  10. De nouvelles épidémies nous décimeront. Car des Bacillus Infernus existeraient dans les profondeurs de nos sols : à force de creuser pour du pétrole, ne va-t-on pas les faire remonter ?
  11. Nous serons stériles, la faute à nos bidouillages génétiques.
  12. Nous aurons des coups de soleil qui se terminent mal : car la couche d’ozone n’est pas sauvée, car nous rejetons trop de clore. Entre autres…
  13. Nous disparaîtrons dans un climat en folie : vous préférez l’aridité ou l’inondation ?
Invasion of the saucer-men edited
Un 14ème scénario ignoré par l’auteur !

Sortie de secours

Un an plus tard, Yves Paccalet écrira “Sortie de secours”, comme une réponse à lui-même, exposant des solutions pour que ça ne finisse pas “droit dans le mur”. Mais on a l’impression qu’il n’est pas convaincu lui-même ce qu’il écrit : “L’Humanité est une chose trop importante pour qu’on la confie aux êtres humains” (p. 12)

On y trouve aussi une réponse à certaines critiques engendrées par le présent ouvrage. Cette seule phrase résume son amertume : “je ne supporte plus d’entendre dire : l’humanité finira bien par trouver des solutions ! (…) Elle signifie : Je me déclare solennellement et définitivement irresponsable.” (p. 12)

Est-ce que depuis lors notre naturaliste s’est assagi et regrette ses provocations ? Eh bien non, puisque “L’humanité disparaîtra…” vient d’être ré-édité.

Avec un bandeau : “revue et aggravée” !

“L’humanité disparaîtra, bon débarras !” par Yves Paccalet, 191 pages, J’ai lu

"Si nous sommes le plus parfait résultat de l'intelligence divine, le QI du Créateur avoisine celui du pithécanthrope !" (p. 97)

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L’émergence des Créatifs Culturels

Les “Créatifs Culturels” sont en train de changer le monde. En suis-je ? En êtes-vous ? Peut-être…

Vous en êtes peut-être

Les “Créatifs Culturels”, en avez-vous déjà entendu parler ? Moi, je les ai découverts il y a quelques mois à peine, en préparant l’interview de Philippe Patouraux. Et pourtant, ils représenteraient plus du tiers de la population américaine, européenne et japonaise (chiffres disponibles où des enquêtes ont été menées).

Et vous savez quoi ? Certains d’entre vous sont des Créatifs Culturels. Mais vous l’ignorez, et c’est la première caractéristique de cette mouvance : les Créatifs Culturels sont en train de changer le monde, mais ne connaissent pas leur appartenance à un groupe qui va dans le même sens…

Ce groupe en constante croissance Paul H. Ray, sociologue et anthropologue, et Sherry Ruth Anderson, psychiatre, l’ont découvert au terme d’une enquête de 14 ans, menée aux USA jusqu’en 1999. On leur doit ce terme de “Créatif Culturel” (ou “Créateur de culture”), et leur livre “L’émergence des créatifs culturels” est l’aboutissement de cette étude, certes portant sur un seul territoire et datant de presque 15 ans, mais restant l’ouvrage de référence pour identifier ces “acteurs d’un changement de société”.

Mobilou se demande s'il n'est pas trop artificiel pour devenir Créatif Culturel...
Mobilou se demande s’il n’est pas trop artificiel pour devenir Créatif Culturel…

Les créateurs d’une nouvelle culture

“Créatifs Culturels”, ou C.C. pour faire court, mais qu’est-ce donc ?

Les C.C. sont des gens en train de créer une nouvelle culture : une nouvelle manière de vivre avec de nouvelles valeurs, respectant l’environnement, encourageant le développement personnel, ayant une prise de conscience globale de notre monde, favorisant la multiculturalité, aimant les projets communautaires. Ils sont idéalistes, ils veulent être acteur du changement.

Leur philosophie c’est d’aller de l’avant, se tourner vers l’avenir pour adopter de nouvelles valeurs et visions du monde, plutôt que de se retourner vers le passé ou de rester prostré dans le présent.” (p.142)

Nos deux auteurs les présentent comme un troisième groupe émergent, entre les Traditionalistes (ceux qui refusent le progrès et l’évolution de la société car “c’était mieux avant”), et les Modernistes (la majorité, à qui on doit notre société actuelle, avec ses bons et mauvais côtés).

Ils sont nettement plus larges d’esprit que la plupart des Traditionalistes et ils prennent leurs valeurs plus au sérieux que la plupart des Modernistes.” (p.87)

En fait, les C.C. sont les grands bénéficiaires des mouvements sociaux des années 60 et 70 (droits des noirs, féminisme, anti-nucléairs, anti-guerre…), qui ont su changer la société, mais pour lesquels il reste du chemin, principalement dans le domaine environnemental.

Une nouvelle philosophie de vie

Si l’on suit la voie royale du succès, on est sûr d’avoir une ‘bonne’ vie : un diplôme, un emploi, une maison, des voitures, une promotion ou des actions ou les deux, des enfants, leur éducation et leur réussite. Mais tout cela, c’est un plan de carrière, pas un chemin de vie. Le jour où vous réalisez que la voie que vous suivez ne correspond pas du tout à ce que vous avez au fond du cœur, vous avez accompli le premier par pour devenir un Créatif Culturel.” (p .78)

Quand on devient C.C., on ne trouve plus le bonheur dans ce qu’offre notre société moderne. La consommation ou la carrière ne sont plus des motifs de satisfaction, laissant place à l’accomplissement personnel, la recherche d’une certaine sagesse, la spiritualité. Ceci constitue donc l’autre volet important des C.C. : c’est une autre philosophie de vie, qui fait la part belle aux femmes et à leur vision.

200 millions de C.C., et moi et moi ?

N’allez pas croire que les C.C. sont juste des doux rêveurs, héritiers du New Age (étiquette qu’ils ne veulent justement pas) : le livre regorge de témoignages de personnes très entreprenantes, parmi lesquelles on compte des patrons d’entreprise et des scientifiques.

Étant un groupe aux frontières larges, on peut être C.C. sans pour autant adhérer à tous ses principes. Le livre commence par un questionnaire “Êtes-vous un Créatif Culturel ?”, mais hélas, je trouve que sur cette base il suffit d’avoir de bonnes intentions pour être C.C. Or, c’est en lisant les témoignages que l’on comprend que les C.C. émergent de la pensée contestataire par des actes et une implication de tous les jours. “Créatif culturel” est donc une étiquette qui me va, ou à tout le moins mieux que celle d’ “écolo”, qu’on aime me coller, faute de mieux !

Questionnez-vous

Et vous, êtes-vous un Créatif Culturel qui s’ignore ? Je vous invite à répondre au questionnaire “Etes-vous un Créatif Culturel ?”, que j’ai programmé sur base de celui de l’éditeur. Mettez ensuite le résultat dans le sondage ci-dessous.

Si vous en êtes et que c’est une révélation, alors peut-être que le livre de Ray et Anderson vous intéressera. Mais le temps a passé, et les C.C. ont envahi le web : c’est dorénavant là que vous trouverez le plus d’informations.

Pour terminer (cet article, mais pas le sujet !), je passe la parole à Patrick Viveret, philosophe : il explique les Créatifs Culturels dans l’émission “Ce soir, ou jamais”. C’était en 2011, face à Nicolas Hulot, qui pourrait en être un s’il était moins pessimiste…

“L’émergence des Créatifs Culturels”, par Paul H. Ray et Sherry Ruth Anderson, 512 pages, éditions Yves Michel

Etes-vous un Créatif Culturel ? (pour vous aider, faites le test dont le lien est donné plus haut)

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