Archives mensuelles : juillet 2012

ExtraPaul lit L'écologie en bas de chez moi

L’écologie en bas de chez moi

Peut-on lire avec plaisir un récit critiquant le comportement écologique, surtout quand nous ressemblons à un des personnages, qui en prend pour son grade ? Oui, on peut, et je le recommande. Tant pis si ça fait mal !

Un film de propagande

Iegor Gran, l’auteur, est un écrivain journaliste, et son récit commence quand il doit faire un papier, pour Libération, sur “Home” de Y. Arthus-Bertrand. “Leni Riefenstahl en avait rêvé, Yann-Dieu la fait” . Voilà la première phrase qui devait commencer son article, et qui fut censurée.

Un peu fort, cette référence à la propagande allemande ? Non, nous répond l’auteur : il voit dans “Home” les mêmes techniques et, pire, celui-ci bénéficie d’une sortie mondiale, avec le soutien de personnalités, et une publicité démesurée. C’est la goutte qui fait déborder le vase : trop d’écolos, trop de greenwashing, trop d’intrusions dans nos comportements, trop de conseils infantilisant !

En territoire ennemi

Parlant de son quotidien (on ne connait pas la part réelle et la part de fiction), Gran analyse les faits et gestes de son entourage, et en particulier de son meilleur ami, Vincent, écolo bobo qui marche au vert pour ce qui l’arrange, suit le mouvement sans esprit critique : “Les catholiques utilisent l’eucharistie pour se purifier des péchés passés et se préserver des tentations futures. Vincent, lui, va au salon “Planète Durable” à la porte de Versailles.” (page 45).

Mais Vincent se hérisse du comportement de l’auteur, et ils finissent par ne plus se voir. C’est une belle amitié qui s’arrête à cause d’un sujet qui fâche, et cela donne la mesure de l’emprise du dogme écologique : la discussion n’est plus permise, émettre des doutes vous met dans le camp des ennemis. Vous devenez infréquentable !

ExtraPaul lit L'écologie en bas de chez moi
J’ai beau faire des efforts : mon chien est plus écologique que moi !

Le dogme écologique

“Même pas mal”, écrit l’auteur : il a beau aller à contre-courant, il persiste à répondre à Vincent, à son voisin, au monde, qu’il ne marche pas dans les rangs, qu’il refuse qu’on lui impose cette religion verte. Mais attention, l’auteur en a après la forme, pas le fond. Il ne se juge pas compétent pour savoir qui a raison, qui a tort, même si le GIEC en prend pour son grade. D’ailleurs il déplore que les contre-arguments des climato-sceptiques, Claude Allègre en tête, soient si peu à la hauteur !

Malgré tout, l’auteur s’est documenté, et il agrémente son récit de notes de bas de pages (ils sont tellement nombreux qu’ils constituent le tiers du livre, à vue de nez), documentant ou complétant ses propos. Et ces notes ne manquent pas de piquant ! Ainsi, quand il voit chez Vincent des ampoules fluocompactes vissées dans des lanternes de fiacre du XIXème, une note de bas page explique la procédure d’urgence en cas de casse (rappelons que ces ampoules contiennent du mercure) : sauve qui peut !

La mort de la culture

Si Gran n’écrivait pas avec autant d’humour et de perspicacité, son histoire ne plairait qu’à ceux qui ne comptent rien changer à leurs habitudes, qui ont pour dicton “Après nous, le déluge” : ils pourraient alors brandir ce livre en braillant “Lisez ce qu’on en pense, de vos préoccupations environnementales. Y’en a marre, foutez-nous la paix”.

Mais l’auteur ne se situe pas tout à fait dans ce camp-là, ou à tout le moins tient une attitude plus réfléchie. On peut ne pas être d’accord avec lui, mais au moins sa position est argumentée. Lui aussi pense que “le ciel ne va pas nous tomber sur tête” . Il s’inscrit dans la pensée humaniste qui met l’homme et son œuvre en avant, ce qui lui fait dire que la pression écologique tue la culture…

On n’a pas la même religion, ce n’est pas grave

J’avais introduit l’article en m’assimilant à un des personnages. Ce n’est que partiellement vrai – du moins je l’espère. Car oui, comme Vincent, je suis assez préoccupé par les questions environnementales, et j’avoue mon émotion en regardant les films de Yann Arthus-Bertrand et Nicolas Hulot. Mais par contre je cherche aussi la contre-expertise, et j’aurais eu plaisir à discuter avec un ami comme Iegor Gran, plutôt que de me disputer avec lui.

En tout cas, son livre m’a confirmé ce que j’ai très vite appris : ce n’est pas parce qu’on a des préoccupations environnementales qu’il faut les imposer aux autres. Mes amis, je ne les ai pas parce qu’on partagerait la même religion…


Pour mieux comprendre les motivations de Iegor Gran…

“L’écologie en bas de chez moi”, par Iegor Gran, 189 pages, éditions P.O.L.

Gestes écologiques, nourriture bio, commerce équitable, etc

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ExtraPaul écoute A Flash Flood of Colour

Enter Shikari, enter Zeitgeist

Je ne peux tout simplement pas être d’accord que nous sommes civilisés. Agissant comme si cette terre est infinie, c’est un échiquier de mensonges” nous chante Enter Shikari. L’occasion est trop belle pour parler d’un groupe de musique. Mais il faut dire que ça va plus loin…

Enter quoi ?

“Enter Shikari” est un groupe électro-metal que je suis depuis (presque) leur début, et on peut dire, en écoutant leur troisième album studio “A Flash Flood of Colour” , qu’ ils ne sont pas vraiment contents de l’état du monde. Les guerres, le pétrole, l’état de la planète, l’effondrement du système, etc : les 11 chansons incitent au changement voire à la révolution.

ExtraPaul écoute A Flash Flood of Colour
ExtraPaul écoute la contestation en chansons

Les groupes consacrant une chanson à la contestation ne sont pas rares, mais de là à en faire tout un album, ces jeunes-là veulent vraiment faire changer les choses. Et pour  montrer leur engagement, ils mentionnent ce site sur leur pochette : thezeitgeistmovement.com.

Ah, le mouvement Zeitgeist, il ne m’est pas inconnu…

Esprit du temps

Zeitgeist veut dire en allemand “Esprit du temps”, plus particulièrement l’esprit culturel, intellectuel, éthique, spirituel et politique d’une société. Un mot qui représente bien ce mouvement, né en 2008 et présent dans presque 50 pays : il se veut apolitique, sans religion, faisant table rase des dogmes qui dirigent notre monde, ceux-ci jugés inefficaces et engendrant conflits et injustices.

Le mouvement en appelle à une prise de conscience de notre monde, à établir une économie basée sur la gestion durable de nos ressources, à considérer tous les hommes de notre terre comme un seul peuple.

Pour y arriver, la science est mise à contribution : le monde ne sera plus dirigé par des politiques, mais par des technocrates rigoureux qui mettront en pratique la maîtrise scientifique dans des domaines comme la sociologie, la gestion des ressources et des énergies.

En fait, le monde proposé par le mouvement Zeitgeist est high-tech, respectueux de la nature et humaniste. De la science-fiction ?

Le monde selon Jacque Fresco

Derrière toutes ces idées, on a un ingénieur, designer industriel et futuriste américain : Jacque Fresco. Dans les années 70, il lance le projet Venus, la base de tout ce qui est dit plus haut. Et on ne peut pas dire que notre homme manque d’imagination : les villes seront circulaires, le gouvernement sera cybernétique, les constructions utiliseront les matériaux à mémoire, les véhicules seront automatisés, etc.

Le monde de Fresco est vaste et ne manque pas d’images, maquettes et films d’animation pour l’exposer : visitez le site et vous découvrirez un univers aussi complet que Star War ! Ou presque…

Mobilou et Jacque Fresco
Mobilou vous montre les projets de Jacque Fresco

Bien-sûr tout cela ressemble à une utopie. Mais celle-ci trouve des sympathisants de par le monde, et donne une réponse aux gens qui veulent totalement changer notre société…

Hélas il faut le reconnaître : cette vision est typiquement dans l’esprit occidental, imaginé comme si tous les hommes de la terre vivaient de la même manière et avaient la même culture (mais peut-être que les pays en voie de développement veulent vivre comme nous, et donc tendre à ce futur idéal ?). C’est un projet pour repartir à zéro, sur une nouvelle planète : la deuxième terre qui nous consommons déjà virtuellement !

Allons de l’avant

En fait, c’est par un film que je découvris le projet Venus, l’année passée : “Zeitgeist : moving foward”. Avec une esthétique soignée, parfois des animations qui nous rappellent “The Wall”, ce document de… 2h41 !, fait le bilan de notre société, de l’histoire du système économique, pour nous amener, sur son dernier tiers, à la présentation du Projet Venus.

Ce film est en exploitation libre sur le web, sous-titré, alors ne vous privez pas de le regarder. Sa longueur s’explique par le nombre de sujets abordés, mais le montage rend tout cela dynamique et passionnant.


Bande-annonce de “Zeitgeist : moving forward”

Pour ma part, j’avais commandé le DVD. Non pour avoir un chapitrage, qui n’existe pas !, mais pour le faire circuler après l’avoir vu confortablement dans mon salon. Et à l’heure qu’il est, il passe encore de main en main : je crois même qu’il a été projeté dans une classe d’étudiants en sciences sociale !

Allez, “It’s in your hands now, whose future ?”, nous écrit Enter Shikari…

Le projet Venus...

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L’idée même de richesse

La question de la richesse, ainsi que du bonheur, est un sujet qui m’attire : dans un monde qui pousse à être heureux en consommant, qui ne donne une valeur à l’individu que sur la base de son travail, qui place socialement l’homme par son argent, peut-on trouver d’autres valeurs de “richesse” auxquelles se raccrocher ? Tentative de réponse avec ce livre, qui rate son public…

Louis XIV et les banlieues

L’auteur, Alain Caillé, sociologue, est fondateur de la Revue du MAUSS (mouvement anti-utilitariste en sciences sociales : je ne développe pas le sujet ici…). Son cheval de bataille : développer une autre forme de richesse, non marchande, axé sur le don.

La première partie de son livre s’attache à relativiser la notion de richesse : être riche dans le sens premier du terme, tel que le PIB aime le mesurer, se définit dans un espace-temps. Ainsi Louis XIV aurait donné une fortune pour avoir l’eau courante chaude ou un dentiste ne le faisant pas souffrir : “Doit-on en conclure que n’importe quel habitant d’une banlieue à problèmes est en fait presque aussi riche, voire plus, que Louis XIV ?” Oui et non…

Cet indétrônable PIB

Concernant ce PIB justement, ce sacré PIB, il serait temps de trouver une autre mesure de la richesse : des études montrent que, passé un certain seuil de richesse national, l’accroissement de richesse n’apporte qu’un bonheur minime, voire nul. La satisfaction du monde occidental stagne depuis les années 70 ! “Autrement dit, et cela mérite d’être noté, depuis les débuts du triomphe du néolibéralisme et du capitalisme rentier et spéculatif” (page 70).

De plus, nos pays “riches” s’accrochent encore à la croissance alors qu’ils perdent leurs industries : n’est-il pas temps que les politiques suivent d’autres baromètres ? D’autres indicateurs existent, mais le bonheur et les définitions alternatives de la richesse sont difficilement quantifiables : on est plus dans la philosophie que l’économie…

Est riche celui qui jouit de nombreuses gratuités

L'idée même de la Richesse, donnée à Mobilou
J’enrichis Mobilou avec ce don

Alors l’auteur en arrive à opposer à la définition étroite de la richesse, la sienne : “est riche celui qui jouit de nombreuses gratuités, sait les recevoir et les reconnaître comme tel, et en prodiguer à son tour” (page 53).

Nous entrons dans la deuxième partie du livre, la plus difficile, car le thème est abordé de manière pointue : il est évident qu’on s’adresse aux initiés, et le lecteur “bêta” que je suis a du mal à s’y plonger avec passion !

On y trouve par exemple, la comparaison entre la richesse relative de l’entreprise qui cherche le profit, et les associations et ONG qui apportent des services gratuits. Ou le management à outrance qui enlève toute initiative aux travailleurs, d’où la balance entre le bonheur apporté par un emploi et celui de pouvoir participer à un objectif.

L’idée même d’un bon livre

On trouve peu de critiques de ce livre sur le net : c’est fou le nombre d’articles qui se contentent de formuler autrement la quatrième de couverture…

Alors je me devais d’en parler, pour mettre en garde : cet ouvrage est ennuyant ! Si la première partie se laisse lire, la deuxième se termine aux forceps. Et ainsi l’auteur manque l’occasion de nous intéresser à ses idées.

Mais le sujet n’est pas clos avec cet article : on y reviendra avec d’autres lectures autrement plus passionnantes, car la richesse, la croissance et le PIB sont de plus en plus mis en cause par ceux qui s’intéressent à notre avenir…

“L’idée même de richesse” par Alain Caillé, éditions La Découverte, 140 pages

Parmi ces définitions autour de la richesse, choisissez votre préférée...

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